Voyons un exemple de ce que l’on fait en thérapie en utilisant une approche TCC particulière : la thérapie des schémas. Certaines femmes reprochent à leur mari de ne pas assez communiquer, d’avoir des difficultés à exprimer leurs ressentis. Intéressons-nous à une femme qui a identifié chez elle un schéma d’abandon ou de carence émotionnelle. Son schéma de pensée la pousse à sur interpréter certains comportements de son compagnon comme, par exemple, une moue, un silence ou une attitude de retrait. Voici un exemple d’analyse fonctionnelle réalisée avec cette patiente :  

 

Explication : Notre patiente va d’abord chercher  à justifier son interprétation auprès de ses amies, de ses proches (biais de confirmation). Si son compagnon est taciturne (les hommes le sont souvent) on lui confirmera son « diagnostic » : effectivement il n’est pas bien. Mais en son fort intérieur, notre patiente aura surtout des pensées du type : « c’est à cause de moi, il est en train de douter de notre couple, il pense à se séparer etc. » ou encore « j’ai fait quelque chose de mal, il est en colère contre moi »… D’où l’angoisse et le besoin que son compagnon puisse la rassurer. Au fond souhaite-t-elle que son compagnon s’exprime plutôt pour la rassurer ou pour lui-même ?

Vous pensez peut-être, si son compagnon parlait plus facilement, elle n’aurait pas ce problème. Oui, mais alors il se passerait ceci :

Explication : Le fait que son compagnon la rassure systématiquement entrainerait bien, dans un premier temps, une diminution de son anxiété/inquiétude mais renforcera son schéma abandon/carence (parce que le schéma de pensée est interne un peu comme une allergie à un aliment, ce n'est pas l'aliment qui est responsable de l'allergie). En conséquence elle deviendra progressivement sensible aux moindres variations comportementales de son compagnon, son angoisse continuera de croitre jusqu’à arriver aux limites de ce que son compagnon peut faire pour la rassurer. Le schéma sera alors beaucoup plus profond et difficile à corriger.

Il convient bien entendu, de bien replacer notre analyse dans son contexte. Beaucoup d'hommes gagneraient à mieux s’exprimer plutôt qu’à laisser s’installer le doute ou l’ambivalence chez leur partenaire. C’est certain. Mais lorsque le comportement perçu comme une « perte du lien » est sans rapport avec ce que ressent vraiment l’autre, alors on a bien un schéma de pensée pathologique (au sens qui entraine une souffrance pour soi et pour l’autre à partir de rien). On dira également que le système de pensée est « égocentrique » car notre patiente ne prend en compte que ce qu’elle ressent et elle ignore les autres possibilités (« il est peut être triste, il a passé une mauvaise journée, il n’a pas envie de parler » etc.). En clair, angoissée par son propre sentiment d’abandon ou carence émotionnelle, elle est sourde à la souffrance de son alter ego.